Full text: Oeuvres posthumes et correspondances inédites

APPENDICE. 
31b 
dans des tristesses qui inquiétaient le capitaine, qui faisait tous 
ses efforts pour le distraire, sans pouvoir y parvenir; il vivait 
dans un isolement complet, ne frayant pas avec les passagers, 
commerçants pour la plupart et officiers. S’il parlait, ce n'était 
que pour émettre le désir de retourner en France. 
Un événement terrible de mer, tel quo le capitaine Saliz m’a 
écrit n’en avoir jamais vu dans sa longue carrière de marin, où 
ils purent presque toucher la mort du doigt, sans que Charles en 
fût démoralisé, cependant, vint ajouter peut-être à son dégoût 
pour un voyage qui, dans ses idées, était sans but. Arrivé àMau- 
rice, sa tristesse ne fit qu’augmenter. Là, où tout était nouveau 
pour lui, il n’a rien vu, rien qui éveillât la faculté d’observation qu’il 
possédait; il voulait à tout prix partir pour retourner à Paris, et 
que, s’il n’y avait pas moyen, il préférait rester à Maurice, plu 
tôt que de continuer ce voyage. Le capitaine, craignant qu’il ne 
fût atteint de cette maladie cruelle la nostalgie, dont les effets 
parfois sont si funestes, l’a vivement engagé à l’accompagner à 
Saint-Denis (Bourbon) et que, s’il persistait là à vouloir rentrer 
en France, il lui donnait sa parole qu’il lui en faciliterait les 
moyens. A Bourbon, il a déclaré, comme à Maurice, qu’il vou 
lait partir; de sorte que M. Saliz s’est entendu avec un capitaine 
du choix de Charles, qui s’embarquait pour Bordeaux, de l’emme 
ner avec lui (sic). Voilà comme Charles nous est revenu au mois 
de février 18/i2. 
Voilà tout ce que je sais de ce voyage. Les détails que je 
viens de vous donner, je les tiens du capitaine Saliz qui me les a 
écrits, au retour de mon fils. Quand j’interrogeais celui-ci sur 
son voyage, je m’apercevais qu’il n’aimait pas à en parler. 
N’était-il pas de même avec les autres, avec ses amis? Je ne sais, 
mais je m’abstenais. M. Saliz m’a écrit aussi que Charles, qui se 
tenait loin des passagers, avait avec lui les manières les plus 
douces et les plus charmantes. Aussi le capitaine s’y était atta 
ché. 
Si Charles s’était laissé guider par son beau-père, sa car 
rière eût été bien différente •. II n’aurait pas laissé un nom dans 
1. Pour être Iranscripleurs fidèles jusqu’au scrupule, mentionnons ce 
commencement de phrase inachevée qui se lit sous une rature : Ceux 
que nous avons emmenés comme attachés d'ambassade....
	        
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