Full text: Les essais de Michel, Seigneur de Montaigne

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ïp. ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE, 
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Zoy diurne, douce 
& aisée* 
S! quelque mnsccntc 
main touche l'Autel, 
auec le don pieux d‘v- 
ne galette de tourment 
trclTaillantc au feu par 
le f e l : le plus riche 
vœu n’apporte aucun 
fl doux charme, à flef- 
chir le courroux des 
DieuxPenates. titr.l.j. 
«i. 2}. 
ou fon,ou fuittcdes mots,ou de noftrc contenance,que dépende 
leur effet. Car ay ans famé pleine de concupifccncc, non touchée de 
repentance, ny d’aucune nouuelle réconciliation entiers Dieu, nous 
luy allons prefenter ces paroles que la mémoire prefte ânoftre lan 
gue : & efperons en tirer vne expiation de nos fautes. Il n’eftricnfi 
aifé, fi doux, & fi fauorablc que laloy diuine : elle nous appelle à foy, 
ainfl fautiers&deteftables comme nous fommes: elle nous tendles 
bras, & nous reçoit en fon giron, pour vilains, ords & bourbeux que 
nous foyons, & que nous ayons à eftre à l’aduenir. Mais encore eu 
recompenfcjla faut-il regarder de bon oeil: encore faut-ilreccuoir 
ce pardon auec action de grâces : & au moins pour cét imftant que 
nous nous adreffons à elle , auoir l’ame defplaifante de fes fautes, 
&: ennemie des pallions qui nous ont pouffe à l’offenfer : Ny les 
Dieux, ny les gens de bien, dit Platon, n’acceptent leprefentd’vn 
mefehanr. 
Immuriis aram f tetigit manus 3 
Non fumpmoja blanàwr hojlia 
Molhuït auerjds Penates 3 
Fane pio, & Jaliente mica. 
T>e r. 
agc. 
Chapitre LVII. 
E ne puis receuoir la façon dequoy nous cftabliffons la 
durée de noftrc vie, levoy que les fages l’accourciffenc 
bien fort au prix de la commune opinion. Comment, 
dit le ieune Caton, à ceux qui le vouloient empefeher de 
fe tuer, fuis-ie à cette heure en âge, ou l’on me puiffe reprocher d’a- 
^Adge de Caton, bandonner trop toft la vie? Si n’auoit-il que quarenteôc huidl ans. Il 
quand il fe tua. eftimoit cét âge-la bienmeur & bien auancé,confidcrant combien 
peu d’hommes y arriuent: Et ceux qui s’entretiennent de ce que ic 
Cours naturel de no- ne fçay quel cours qu’ils nomment naturel, promet cjuelques années 
jlre lue. a u delà j ils le pourroient faire, s’ils auoient priuilege qui les exem 
ptai! d’vn fi grand nombre d’accidens, aufquels chacun de nous cft 
en bute par vne naturelle fuje£tion, qui peuuent interrôpre ce cours 
qu’ils fc promettent. Quelle refuerie eft-ce de s’attendre de mourir 
vieillcjfe extrême j d’vne défaillance de forces, que l’extrême vicilleffe apporte, & de fe 
propoferce buta noftrc durée-, veuquec’eftl’efpccedemort la plus 
Naturelle ,que cejl. rare de toutes, & la moins en vfage ? N ous l’appelions feule naturelle, 
comme fi c’eftoit contre nature, de voir vn homm'efe rompre le col 
d’vne cheutc, s’eftouffer d’vn naufrage, fe laiffer furprendre â la pefte 
ou â vne pleurefie, & corne fi noftre condition ordinaire ne nous pre- 
fentoit à tous ces mconucniés.N e nous flatons pas de ces beaux mots; 
rare,
	        
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