ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
Ayc vn nez à pompet
tes, & fois toy-mcfrac
Vu nez , tel qu’Aclas ne
ic vciiille porter à priè
res, & puifles-tu, mo*
queur,draper le mefrac
Latinus ; tu ne peux di
re pis courre mes refue-
ries,que ce que i’ay dit
auanr coy. Que te Terni
ra de ronger vue dent
ailée vue autre dent ?
cherche de la chair, (î
tu te veux faouler. Ne
perds donc plus de têps
& varefpandrc tou ve
nin fur ceux qui font
admirateurs de leur ou-
«rage : ie oognoisquât
à moy , que cctuy- cy
n'eft qu’vue friuolc,
Mart.l.t}.
Pourtraiftde René
Roy de Sicile ,futt
par luy-mejme.
Petrarc.
apparences engrad
nombre , és ihofes
humaines.
Lors que l’efprit ba-*
lance fur quelque dou
te, vu léger grain l'em
porte d’vue part ou
d’autre. Ter. And.Aii.i.
Etfinem’cxcufepas, d’ofer mettre par cfcric des propos fi bas & Fri,
uoles que ceux-cy. Labaffeffedu fujetm’y conrramc. Qrfon acculé
ïîon veut mon projet, mais mon progrez, non. Tant y a que fans
i’aduemlTcmenc d’autruy, ie voy allez le peu que tout cecy vaut&
poife,&lafoliede mondeffem. C’eft prou que mon iugement nefc
defferre point, duquel ce font icy les Ellais.
Tfaftus fis nji'quc liceiyfs de ni que nafus,
Quantum noluerit ferre rogatus Atlas :
Et pojfts ipfum tu deridere Latinum;
Non potes in nugas diccre plura me as,
Jpf eçro cjudm dixi : cjuïd dentem dente iuuahit
Rjodere ? carne opus ef ,ffutur ejfc ajelis.
Ne perdus operam, qui f mirantur, in illos
Virus hahe, nos hac nouimus ejfe nihil.
le ne fuis pas obligé à ne dire point de fottiles, pourucu que ie ne me
trompe pas aies cognoiftrc : Et de faillira monelcient, celam’cftli
ordinaire , que ie ne faux guère d autre façon, ie ne faux guère for
tuitement. C’eft peu de chofe de prefter à la témérité de mes humeurs
les a étions ineptes, puis que ie ne me puis pas me défendre d’y prefter
ordinairement les vicieufes. le visvn iour à Barleduc, qu’on prelen-
toit au Roy François fécond , pour la recommandation de la mémoi
re de René Roy de Sicile, vn pourtraiét qu’il auoit luy-mefmcs fait
deloy. Pourquoy n’eft-illoilibledemcfmc a chacun, de le peindre
delà plume,commeilfepeignoit d’vncrayon ? le ne veux doncpas
oublier encor cettecicatnce, bien mal propre a produire en public.
C’eft l’irrefolution : defaut tres-incommodc à la négociation des
affaires du monde : le ne fçay pas prendre party csenrreprifesdou-
teules.
Ne fi, ne no, ncl cor rni juona intero.
Ic fçay bien fouftemr vne opinion, mais non pas lachoilîr. Parce
qu’éschofes humaines, à quelque bande qu’on panche, ilfe prefente
force apparences qui nous y confirment : & lePhilolophe Chryfip-
pusdiloit, qu’il ne vouloit apprendre de Zcnô & Cleanthes fes mai-
ftres, queles dogmes fîmpleraent: car quant aux prennes ôe.raifons,
il enfourniroit affez de luy-mefme.De quelque cofté que ie me tour
ne, ic me fournis toufiours allez de caufc & de vray-femblancepour
m’y maintenir ; Ainfî r’arrefte chez moy le doute, & la liberté de
choifir,iufques à ce quePoccafton me preffe : Et lors,à confeffer lave»
ritéjie iette le plus forment la plume auvent, comme on dit, ôc m’a
bandonne àla mercy de la fortune : Vne bien legere inclination &
circonftance m’emporte.
Dum in dubio ef animus, paulo momento hue atquc illuc impcllitur.
L’incertitude de mon iugement, eft ft également balancée en la pluf-
part des occurrences, que ie compromettrois volontiers à la decifion
du fort «Sc des decs. Et remarque auec grande conftderationde noffre