Full text: Les essais de Michel, Seigneur de Montaigne

ÏCQ ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE, 
Ah qùsîie folie petit 
perfuader, d'eftabltr ou 
loger quelqü’va en Ton 
ame, qui foit;plus cher 
qu'on ne l’eft pas àfoy- 
incline! Terttu. Adelp. 
sltt. i. 
Solitude loüahle en 
ceux cjW ont don 
né leur adfre pim flo- 
njjanta» monde. 
Sçavoir ejlre à foy, 
que cej}. 
C'cft chofe rare, que 
chacun fe rcfpefte foy- 
mefmc luflilammcnc. 
Senec». 
^émes propres à U 
veirditte&fvlit»de a 
quedeluyouurirlaporte;penfes-tu qu ils y foient pour eux? pour tel 
à l’aduenture, qu’ils ne virent onques, & qui ne fe donne aucune pei 
ne de leur fait, plongé cependant en l’oy fmeté aux dclices. Cetuy- 
cy tout pituiteux, diafTieux & cralfeux, que tu Vois fortir apres mi- 
nuiél d’vn ellude, penfes,-tu qu’ il cherche parmy lesliures, comme il 
fe rendra plus homme de bien,plus content & plus fage ? nuiles nou- 
ueiles. Il y mourra, ou il apprendra à lapofterité la mefure des vers de 
Plaute,& la vraye orthographe d’vn mot Latin. Qui ne contre-chan 
ge volontierslafantéjlereposj&la vie, àlarcputation & à la gloire? 
la plus inutile,vainc & faune monnoyc, qui (oit en nollre vfage. No- 
ftre mort ne nous faifoic pas alfez de peur, chargeons-nous encores 
de celle de noi femmes, de nos enfans, & de nos gens. Nos affaires ne 
nous donnoicnr pas allez de peine, prenons encores à nous tourmen 
ter & rompre la telle, de ceux de nos voifins & amis. 
Vah quemçjuamne hominem in animurn mJUtuere , aut 
Par are, cjuod'Jtt ch arm , cjudm if je eftfibif 
Lafolitude mcfembieauoir plus d’apparence , & de raifon, à ceux 
qui ont donné au monde leur aage plus adtif& fleuriffant, à l’exem 
ple de Thaïes. C’ell allez vefeu pour autruy, virions pour nous au 
moins ce bout de vie-.ramenons à nous & a nollre aife, nos penfées 
& nos intentions. Ccn’eft pas vnc legere partie que de faire feure- 
mentfaretraitc : elle nous empefehe alfez fans y meller d’autres en- 
treprinfes. Puis que Dieu nous donne loifir de difpofcr de nollre def- 
logement, préparons nous y, plions bagage, prenons de bonn’heurc 
congé de la compagnie, defpeftrons-nous de ces violentes prinfes, 
qui nous engagent ailleurs, & nous edpignét de nous. Il faut dénoüèr 
ces obligations il fortes;& meshuy aymer cecy & cela, mais n’cfpou- 
fer rien que loy : C’ell à dire,de relie foit a nous: mais non pas ipitttdi, 
colé en façon qu’on ne le puilfe defprendrc fans nous efcor cher, & ar 
racher enlembiequelque piece du nollre. La plus grande chofe du 
monde,c’ell de fçauoir ellre à foy. Il ell temps de nous defnoüer de la 
focieté,puis que nous n’y pouuons rien apporter. Et qui ne peut pre 
lier, qu’il 1 e defende d’emprunter, N os forces nous faillent : retirons 
les, & refferrons en nous. Qui peut renuerfer & confondre en foy les 
offices de tant d’amitiez, «5c de la compagnie, qu’il le face. En cette 
cheute, qui le,rend inutile, poifant, & importun aux autres, qu’il fe 
garde d’ellre importun à foy-mefme , & poifant & inutile. Qunl 
fe datte & carelfe,& fur tout le regenre, refpédlant & craignant fa rai- 
fon & fa confcience : fi bien qu’il ne pin fie fans honte, broncher en 
leurprefence. Ranm cfi enim,njt fatis Je cjuijcjue njtreatur. Socrates dit, 
queles leunesfcdoiuent faire inllruire, les hommes s’exercer à bien 
faire ;|es vieux fe retirer de toute occupation ciuile & militaire, vi- 
uans à leur diferetion, fans obligation à certain office. Il y a des 
complexions plus propres à ces préceptes de la retraite les vues que 
lesautres. Ceuxquioncl’apprehennonmolle&lafche, & vue alfe-
	        
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