Full text: Les essais de Michel, Seigneur de Montaigne

Atnfi nous lofions vn 
fiieual pied-volant, à 
l’agile IbuppleiTc du 
quel mainte palme rid, 
& la viâoire applau 
dit, dans le Cirque en 
roué de trompettes. 
iuu.fett. 8. 
186 ESSAIS DH MICHEL DE MONTAIGNE 
—;—volucrem 
Sic laudamus equum 3 fiadli cm plurima palmœ 
Feruet, (fif exultât- rauco njlcloria circo 3 
non de Ton harnois ; vn leurier, de fa vitelfe, non de Ton coller : vn oy~ 
feau, de fon aiüe, non de fes longes &: fonnettes. Pourquoy de mef- 
r homme eflima- mes n’cftimons-nous vn homme par ce qui eft lien? Il a vn grad train, 
hle par ky-mefme> vn beau Palais, tant de crédit, tant de rente: tout cela eft autour de 
non par fies attom. ftiy, non en luy. Vous n achetez pas vn chat en poche : ft vous mar 
chandez vncheual, vous luy oftez fes bardes, vous le voyez nud&à 
defcouuert : Ou s’il eft couuert, comme on lesprefcntôitancienne- 
ment aux Princes à vendre, c’cft par lesparties moins neceftaires, afin 
que vous ne vous amuftez pasà la beauté de fonpoil, ou largeur de fa 
croupe, & que vous vous arreftiez principalement à connderer les 
iambes, les yeux, &: le pied, qui font les membres les plus vtiles 5 
F^egibus hic mos cfi 3 njhi equos mercantur 3 opertos 
Infiiciunt, ne fi fades 3 'vtfiepe, décora 
Molli fulta pede efi 3 emptorem inducat hiantem 3 
Ouod pulchrœ dunes 3 hreue quod cap ut 3 arâua ceruix. 
Pourquoy eftimant vn homme, l’eftimez-yous tout enueloppé & 
empacqueté ? Il ne nous fait montre que des parties, qui ne font au- 
’enuie apres eux foit cuncinent fiennes : & nous cache celles, par leiquelles feules on peut 
E.om P yra y ement ingerdc fon eftimation. C’eftlcprixde l’efpée que vous 
cherchez, non de la guaine : vous n en donnerez à l’aduenturepas vn 
quatrain, fi vous l’auez defpouïllée. Il le fautiuger parluy-mcfme, 
non parfes atours. Et comme dit tres-plaifammentvn ancien : Sça- 
uez-vous pourquoy vous l’eftimez grand? vous y comptez la hau 
teur de fes patins: La bafe n’eftpasde la ftatuë. Mefurez-le fans fes 
cfchaces : Qtf il mette à part fes richeffes & honneurs,qu’il fe prefente 
en chemife : A-il le corps propre à fes fon£tions,fain & allègre ? Quel 
le ame a-il ? Eft-elle belle, capable, &r heureufement pourueuë de 
Cc.fagc, ccctuy-iàqui toutes fes pièces ? Eft-elle riche du lien, ou de l’autruy ? La fortune 
commande à foy-mef- , it 1 ~ - i 11 i i J r r 
me,que la mort,fa pau- ny a-eiie que voir? Si les yeux ouuerts elle attend les elpees traites: 
pwuemeffraywfpuîf- s> d nc tay chaut par où luy forte la vie, par la bouche, ou par le go fier? 
^cblfiêfepiditez 25 * ^ e ^ e e fi ra lfi^ e } equable & contente : c’eft ce qu’il faut voir, ôc iuger 
C’eft la façon des Rois 
acheptans des chenaux 
bardez,de regarder foi. 
gneufement, <i fous ce 
bel afpeél ,ce col.relc- 
ué, cette petite telle, & 
cette large croupière, 
ils ne font point mal 
cftayczde pied,cornme 
il arriue louuenr : dont 
l’achepteur qui bée 
mefptifer ks ligueurs, par là les extrêmes différences qui font entre nous. Eftûl 
& qui cil en foy tout *■ r • ri ■ ■ ■ r 
" • -Japiens j Jtbicjue imperiojus 3 
rond, tout efgal & tout 
vny, de peur que rou 
lant fou cours , rien 
d externe n’ait potmoir 
de l’arrefter: &fur qui 
la fortune en fuite rue 
toulkmrs fes coups vai 
nement.idem, l.z.fat.7. 
Quem neque pauperics 3 neque mors 3 ne que 'vincula terrent, 
Jiefionjare cupidinihus 3 contemnerc honores 
F ortis & in fiipfi totus teres atque rotundus 3 
Externi ne quid ualeat per Uue morari 3 
In quem manca mit Jemper fortunaf 
luy mefme k foy fon Vn tel homme eft cinq cens braffes au delfus des Royaumes & des 
empire. Duchcz : il eft luy-mefmc à foy fon Empire» 
L’homme fore efl 
Certes le fage fait foy 
mefme fa fortune. 
Simm, 
Sapiens pol ipfi fingit fiortunam fibi. 
Que luy refte-ii à deftrer?
	        
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