Full text: Les essais de Michel, Seigneur de Montaigne

LIVRE PREMIER. 
-‘■nonne ajidemus 
187 
Nil aliud fthi naturam latrare 3 mfi njt cum 
Corporefteiunflus dolorahftt, mente jritatuf* 
lucundo fenfu cura, femotus metüque ? 
■Comparcz-luy la courbe .de nos hommes, ftupide, balle, fcmiîe, in- 
Rabl'e, &: continuellement flocante en l’orage des palfions diuerfes, 
qui la pondent &c répondent, dépendant toute d’autruy : il y a plus 
d’edoignetnent que du Ciel à la terre : &: toutefois i’aueuglement de 
noftre vfage ed: tel, que nous en faifdns peu ou point d’eftat. Là où, 
fi nous confiderons vn païfan & vnRoy,vn noble &vn vilain,vn 
magiftrac & vn homme priué, vn riche & vn panure ; il fe prefente 
foudainànos yeuxvne extrême difparité : qui ne font differents par 
manière dédire quenleurs chaudes. EnThrace, le Royeftoit di 
stingue de fon peuple d’vne plaidante manière, & bien r’cncherie. 
Il auoit vne Religion à parc : vn Dieu toutà luy, qu’il lïappartenoit 
àfes fubjets d’adorer : c’eftoic Mercure : Et luy, deldaignôit les leurs. 
Mars,Bacchus, Diane. Ce ne font pourtant que peintures,qui ne 
font aucune diflemblance edencielle. Car comme les loueurs de 
Cornedie,vous les voyez fur l’efehaffaut faire vne mine de Duc tk 
d’Empereuir, mais tantoft apres, les voila deuenus valets&croche- 
teurs miferabies, qui eft leur naïfue & originelle condition: auffi 
l’Empereur, duquel la pompe vous efblouïc en public j 
Scilicet fft) grandes viridi cum luce fmaragdi 
Aura includuntur 3 tentürque Thalajftna njeftis 
Ajftduè, &' Nencns Judorem excrcita potat 3 
voyez-le derrière le rideau, ce n’eft rien qu’vn homme commun, &c a 
î’aduenture plus vil que le moindre de fes fubjets. Ille heatus introrftum 
eft: iftius hracle ata félicitas eft. La coüardife,l’irrefolucion, l’ambition, 
le dcfpic & l’enuic l’agitent comme vn autre : 
Non cnim ga%x, neque conjularis 
Summouet liflor 3 mijeros tumultus 
Mentis 3 (ftp curas laqueata circum 
Te fia 'volantes : 
& le foin & la crainte le tiennent à la gorge aü milieu de Tes ar 
mées. 
Re ‘vcrdque me tus hominum 3 curœque ftquacè$ 3 
Nec metuuntJonitus armorum 3 neeftera icla 3 
Audaflerque inter reges 3 rerumquê patentes 
Vcrjantur 3 neque ftulgorem reucrentur ah aura. 
La fiebure , la migraine &c la goutte l’efpargncnt-elles nori plus 
que nous ? Quand la vieillede luy fera fur les efpaulcs, les archers 
de fa garde l’en defehargeront-ils ? Quand la frayeur de la mort 
le tranfira, fc r’alfcurcra-il par l’aftiftancc des Gentils-hommes 
de fa chambre ? Quand il fera en ialoufte & caprice , nos bon- 
nettades le remettront-elles ? Ce ciel de lidt tout enflé d’or ôi de 
,Qj ü î 
Ne vois tu pas que la 
Nature n’abbaye alttre 
chofe/mon que ia dou 
leur s’efcartc du corps, 
quil iouiffe d’vu cfprit 
fain, & que les feus fe 
refiouïfléut , les fonds 
& la crainte chaflMaii 
loiiii tuer. I. z. 
Roys de Thrdce 3 efr 
quoy diftingue^ de 
leur peuple. 
Similitude. 
Empereurs coninte 
les homes càmuns, 
[1mets aux 
& accidens. 
Il endort les grandes 
Sclumiaéufcs elhterau- 
des eil l’or: il traifnc 
toûiours vn fomptueux 
habit de la couleur des 
flots. Uitr.l.4. 
Cettuy-là portede vue 
interne & maflîuc féli 
cité : cét autre vne, qui 
11 eft que fimplcmcut 
dorée dvne legere 
fùeillc. S en. ep. us. 
Les trefors Ou les li~ 
fleurs confulaircs, ne 
chaflent pas de Tante 
les piteux troubles ny 
les poignantes folici- 
tndes,qui volent à Tcn- 
tour des magnifiques 
lambris du plancher 
d’vn Palais .Hor. I. z. 
De vraf les tethpefteS 
d efprit,& la parte peur, - 
le fuiuent : ne daignas 
les cliqüetis des armes 
iiy les dards cruels : ils 
rodent fiererrient par- 
fny les Roys & les Em 
pereurs , fans rcueret 
î’efclac de Tor. Lncr.t.i
	        
Waiting...

Note to user

Dear user,

In response to current developments in the web technology used by the Goobi viewer, the software no longer supports your browser.

Please use one of the following browsers to display this page correctly.

Thank you.