LES BENI-ISRAËL A L’ÉTAT NOMADE. 29
par des êtres supérieurs, ou comme des disgrèces
plus ou moins susceptibles d’être conjurées.
La terreur, l’affolement, le vertige étaient la con-
séquence de ce système de la nature tout à fait
erroné. Primus in orbe deos fecit timor est une for-
mule admirablement vraie. L’homme se croyait en-
touré d’ennemis qu’il cherchait à apaiser. L’édu-
cation de ses sens étant à peine faite, il était dupe
de perpétuelles hallucinations. Un souffle inat-
tendu, un bruit inexpliqué étaient pour lui des
signes intentionnels. Un spiritisme exagéré lui fai-
sait admettre partout des esprits, êtres invisibles,
sortes d’ombres ou de doubles des choses®, qui
l’obsédaient et se confondaient avec les phéno-
mèênes subjectifs de sa conscience. Le type d’une
telle vie se voit, ou du moins se voyait encore il y a
quelques années aux îles Maldives, par exemple.
Les indigènes de ces pauvres ilots passaient la nuit
barricadés dans leurs huttes, croyant l’air téné-
breux rempli de génies malfaisants, dont ils s’ima-
ginaient entendre les frôlements. La crainte des
ténèbres et, en général, les peurs irréfléchies, très
vivaces encore en certaines races, en Bretagne par
1. Réville, Religion des peuples non civilisés, t. 1”, pp. 67 et
suiv., 228 et suiv. ; t. II, p. 89 et suiv.